Après les trois courses des 1er Tests de séléction de l'équipe de France, disputées dans l'Aveyron les 22 et 23 mai... Thierry Gueorgiou nous a accordé une interview exclusive dans laquelle il revient sur son week-end, et plus généralement sur sa manière d'aborder la CO, et la saison à venir.


- 3 courses, 3 victoires. Ca devient une habitude ! Comment fais-tu pour être à 100% concentré sur toutes les courses et garder la motivation pour la gagne à chaque fois que tu courres ?

 tero - La clé est cachée, je pense, dans la manière dont j'aborde les courses. Je ne recherche pas la victoire mais plutôt à répondre aux problèmes posés par la carte, le tracé ou encore le terrain. Je suis toujours concentré sur la manière, plutôt que sur le résultat. Et enchaîner les 3 courses est assez simple finalement... surtout dans un tel cadre !!! Les trois formats sont tellement différents que j'ai beaucoup de choses à penser pendant la préparation de la course et pendant la course elle même. Je n'aborde pas le premier poste du sprint comme celui de la middle ou de la longue. Tout cela représente un vrai challenge à relever : apporter la meilleure réponse possible aux problèmes posés... Et je peux ajouter que je prends vraiment beaucoup de plaisir sur chacun des formats, chaque distance est spécifique. Je dois aussi avouer que la classique de ce week-end est la course qui m'a apporté le plus de plaisir.

- Parle nous un peu de cette nouvelle carte que tu semblais attendre avec beaucoup d'impatience.

 tero - Absolument. Chaque nouvelle carte produite dans cette région est susceptible d'être un "chef d'œuvre". Et ce fût une nouvelle fois le cas ! Quelque chose d'unique que l'on ne rencontre pas si souvent que ça dans une carrière d'orienteur. Personnellement je la classe dans les toutes meilleures cartes du Monde. Et visiblement le CDCO 12 ne veut pas en rester là avec beaucoup de projet à venir. C'est vraiment quelque chose que j'apprécie énormément et je les remercie évidemment pour leur travail. Un terrain de cette qualité nécessite une cartographie parfaite, c'est ce qu'ils ont réussi à faire. Essayer d'approcher la perfection dans son orientation sur ces terrains est vraiment motivant et pousse à donner le meilleur de soi-même...

- Selon toi, comment approcher alors la perfection sur un tel terrain ?

- C'est vraiment difficile à dire. C'est un mélange subtil d'expérience, de technique, de tactique ou encore de mental. Une alchimie à trouver.

- Apparemment, tu as réussi à trouver cette alchimie... estimes-tu néanmoins avoir fait des erreurs ce week-end ?

 tero - Je pense que sur ce type de terrain, une des clés est de savoir gérer la variation d'allure. C'est tellement simple d'arriver proche du poste, mais déjà beaucoup plus dur de le trouver directement. Neuf fois sur dix, comme sur les autres cartes d'ailleurs, il y a possibilité de construire une "image mentale" du terrain simplifié et donc d'aller vite. J'ai plutôt bien réussi à m'adapter aux caractéristiques du terrain ce week-end. J'ai construit les bonnes images, fais les bonnes sélections d'éléments pour m'orienter, etc... Une des clés sur la classique et la médium a été l'utilisation quasi-permanente de la loupe en approche de poste, tout devenait alors beaucoup moins complexe qu'au premier abord... Malgré cela, j'ai commis quelques erreurs en voulant aller trop vite et en limitant les phases de lecture de précision... Mais disons que je suis particulièrement satisfait de ma condition physique et de mon endurance de concentration. Même si évidemment dans les prochains mois il me faudra faire des course parfaites !

- Quelques erreurs... qui ne te font perdre en général qu'une poignée de secondes seulement. A quand remonte ta dernière grosse faute, de plus d'une minute par exemple ?

 tero - 1 min cela m'arrive à l'entrainement lorsque je suis à moitié concentré. Par contre je fais tout en compétition pour éviter ce genre d'erreur. Pourtant lors de la classique je n'ai pas été loin de perdre autant avec 45 secondes d'envolée sur le poste 3. Mais encore une fois je recherche la perfection, et tant que je considérerai que 5 secondes d'hésitations en approche de poste est une erreur je serai sur la bonne voie. Je pense qu'à mon niveau 30 secondes d'erreur correspond aux 5 minutes que peut perdre le débutant lors de ces premières courses. C'est assez logique finalement.

- Comment expliques-tu ton changement progressif de statut, et de niveau... cette capacité à miniser les fautes... As-tu connu un déclic ou tout cela est-il plutôt le résultat d'une lente progression ?

 tero - A la fois le résultat de déclics et surtout d'une lente progression. La réussite en course d'orientation est un véritable puzzle où il faut réunir chaque pièce pour être performant. C'est vraiment complexe et chaque seconde passée en forêt t'aide dans cette voie là. Il n'y a pas de miracle en CO, le travail finit toujours par payer tôt ou tard. Mais tu évoques également les déclics qui jouent un rôle important. Un jour, tu arrêtes de vénérer les scandinaves et tu te mets à desserrer le frein à main, un autre jour, tu te dis qu'une classique c'est finalement pas aussi long et tu pars sur le même rythme qu'en médium, etc... C'est ça que j'appelle des déclics et effectivement cela peut avoir des conséquences importantes sur ce que j'appelle "ta philosophie" de la CO... Mais la base reste toujours le temps que tu passes "carte en main", c'est là que tu construis tes réussites (ou tes échecs d'ailleurs). Exemple, si tu fais comme Senna et que tu sors t'entraîner à chaque fois qu'il pleut, tu seras plutôt souriant et confiant quand tu verras l'orage venir le matin de la compétition. Tout est une question d'attitude !

- Et dans tout cela... que t'as apporté concrétement ton titre 2003, niveau sportif et extra-sportif... un nouveau déclic ? un autre pallier ?

 tero - Beaucoup de choses effectivement. Tout d'abord beaucoup de confiance en mon orientation. Je sais que si je fais "mon" orientation, je suis très compétitif. Cela m'apporte une certaine sérénité dans mon approche de la compétition. Je n'ai rien à inventer le jour de la course, seulement faire ce que je fais à l'entraînement. Ensuite, après une course comme celle réussie en Suisse, c'est très difficile de se "contenter" de courses moyennes. Je suis devenu encore plus exigeant avec moi même. Je pense pouvoir dire que j'ai à peu près progressé dans tous les domaines depuis mon titre en Août 2003. Je pense également arriver à bien gérer l'attention qui peut se fixer sur moi. Et cela est un bon point car plus on se rapprochera des WOC 2004, plus on me demandera d'être performant ! Mais j'ai bien digéré l'année 2003 et c'est d'ailleurs une des clés du WOC 2004: que j'oublie ce qui s'est passé l'an dernier, même si je suis pratiquement sûr d'entendre chaque jour le mois avant les championnats que j'ai un titre à défendre ! Mais je me sens prêt pour le challenge !

- Tu parles évidemment beaucoup des prochains Chpts du Monde. Quels sont tes objectif cette année... et les moyens d'y parvenir ? Comment réagiras-tu si tu y parviens... ou si tu n'y parviens pas ?

 tero - Sans me mentir, mon objectif est le WOC en Suède. Je fais tout pour être prêt le jour J. Conserver mon titre, même si je n'aime pas trop cette expression, est un objectif. Être le premier à conserver son titre en courte distance est un vrai challenge. Mais pas d'enflammade, comme je l'ai dit précédemment, tout se passera à l'entrainement, avec moi même. La difficulté est de ne pas se baser sur 2003 dans la préparation, car c'est le meilleur moyen de se louper. Tout sera différent cette année. Je dois avouer que la Classique fait aussi partie de mes objectifs. Je me suis entraîné dur pour être prêt à courir 100 min à 100%. Et je prends beaucoup de plaisir en Classique. Cette année, j'ai peut être inconsciemment mis le sprint entre parenthèse même si j'essaye de rester performant. Maintenant même si je fais tout pour être performant le jour J, il se peut qu'un petit grain de sable vienne tout dérégler. Je dirais que le plus important est que je me fasse plaisir tout au long de la préparation. Si c'est le cas, à aucun moment j'aurai l'impression d'avoir perdu mon temps si le résultat final n'était pas à la hauteur de mes ambitions.

- Merci Tero et bonne chance, on est tous avec toi...
  

   
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